Chronique N°872
Avril 2012 a été marqué par deux calamités assez ponctuelles dans notre région :
La neige de la mi-avril sur le Pilat a déposé des épaisseurs identiques à celles de 2005 et vous trouverez une analyse plus complète dans le prochain bulletin des météorologistes d’entre Rhône et Loire (sortie vers le 10 mai)
La tempête de la nuit du 28 au 29 avril dont le caractère catastrophique a été provoqué par un petit nombre de très grosses rafales entre 23 heures et 1 heures, affectant le couloir méridien de la Loire supérieure dans l’axe du vent de sud impliqué . Cette tempête a correspondu, avec les pluies qui ont suivi sur les crêtes entre Mézenc et Pilat, à la fin de la situation de blocage que je vous présentais samedi dernier. L’anticyclone qui était venu depuis le mercredi 25 avril bloquer les perturbations atlantiques, a résisté jusqu’à Dimanche distribuant coups de vents et fortes pluies sur de nombreuses régions, puis il a disparu comme par enchantement le dernier jour du mois et avec lui les grosses calamités.
Avril a totalement contredit mars autant pour les températures que la pluviométrie.
Pour cette dernière, le cumul a dépassé 100 mm sur une grande partie du pays dans un mois qui est rarement très arrosé (carte jointe). A ce moment de l’année, les principaux types de temps fournisseurs de pluie se raréfient qu’ils soient océaniques, moins de perturbations, ou méditerranéens, peu d’événements cévenols. Deux seuls grands secteurs n’atteignent pas ce seuil de 100 mm. Il s’agit d’abord d’une grande bande méditerranéenne qui s’étire du Pays toulousain à la Provence. Elle s’arrête vers le nord aux premières pentes des reliefs du Massif central ou des Préalpes. Puis, Le second ensemble moins arrosé correspond au nord-est du Bassin parisien avec un débordement jusqu’en Alsace et dans les plaines de La Saône
La répartition des pluies supérieures à 100 mm à l’intérieur de la France, privilégie les reliefs des Pyrénées atlantiques, de l’ouest du Massif central, du Jura et des Alpes. A l’intérieur de ces derniers on constate d’énormes contrastes sur quelques kilomètres de distance entre les massifs et quelques bassins proches. Ces derniers écarts sont particulièrement marqués sur le Pilat qui reçoit 222 mm à Tarentaise à 1100 m d’altitude , mais seulement la moitié à Saint Etienne avec 109.2 mm, et encore bien moins à Andrézieux à l’entrée de la Plaine du Forez avec 88,5 mm. Quel contraste entre les deux capitales auvergnates avec Aurillac 204 mm et Clermont Ferrand 69.9 mm ! Par ailleurs les Ardennes sont très arrosées alors que les Vosges ne sont beaucoup moins. Quel contraste aussi dans les Pyrénées entre l’ouest atlantique plus de 200 mm et l’est catalan moins de 100 mm !
La répartition des pluies privilégie aussi les littoraux de l’Atlantique et de la Manche, mais là encore avec quelques secteurs qui ont été oubliés. Dans les Landes quand Mont de Marsan reçoit 241 mm et Cazaux 179 mm, le Cap Ferret pourtant très proche reste à 98 mm. Un peu plus au nord quand la pointe de Chemoulin n’accumule que 63 mm , Nantes dépasse 105 mm. En Bretagne, quand Belle île atteint seulement 94 mm, Lorient arrive à 183 mm et Quimper à 225 mm. En Manche quand le cap de la Hague ne reçoit que 97 mm, Cherbourg atteint 144.9 mm et Valognes encore plus. En temps ordinaire les différences sont en sens inverse et des points du littoral habituellement très arrosés ont été partiellement oubliés.
En réalité cette très forte pluviométrie est faite de glissières plutôt méridiennes. La première grossièrement sud-ouest nord-est s’étire des Landes, au Bordelais (178 mm à Bordeaux), aux Charentes (198 mm à Angoulème), effleure le limousin et termine sa course en Poitou et dans le Maine. Une autre suit les crêtes des Cévennes (259 mm au Mont Aigoual) au Pilat et se poursuit jusqu’au Morvan. Enfin la troisième plus logique remonte des Alpes au Jura.
Ces bandes plutôt méridiennes sont liées au caractère atypique d’un certain nombre de pluies, les temps de nord-est de retour qui ont déposé tant de neige sur la Pilat à la moitié du mois, et les lignes de fortes pluies correspondant au blocage des derniers jours .
La conséquence de cette forte pluviométrie, avril avait commencé dans la sécheresse, il s’est terminé dans les crues qui affectent en même temps 3 ensembles de régions.
D’abord dans le grand centre-ouest, l’ensemble des rivières a réagi.
Celles descendant du plateau de Millevaches ont ouvert le bal le 27 avril. La Vienne et la Vézère ont connu depuis cette date 3 pointes selon les différentes averses successives. En amont celle du 27 l’emporte, mais vers l’aval la seconde du 29 avril monte plus haut sur la Vézère à Montignac et la troisième prédomine sur la Vienne aval à Châtellerault.
Dans un second temps les crues se sont déplacées un peu plus à l’ouest pour la fête du travail. La Sèvres nantaise dépasse 2.5 m le 30 avril Le Thouet atteint 3.5m à Pont de Chacé dans la nuit du 1er mai. La Charente à Angoulême ne connait son maximum qu’en fin de journée avec une cote à 4.10 mètres.
Plus au nord les crues ont affecté de façon secondaire le bassin de la Maine qui monte à 3 m à Angers. L’ensemble de ces cours d’eaux provoque une intumescence modérée sur la Loire avec 2000 m3s à Montjean.
Les rivières du Bassin parisien réagissent avec deux secteurs L’Yonne et l’Armançon descendant du Morvan et L’Aisne affectée par les pluies des Ardennes. Cette dernière monte encore le 3 mai.
Dans tous ces cas, les crues prennent de l’importance de l’amont vers l’aval des rivières, mais rentrent dans le rang après la confluence avec les grands fleuves.
Enfin la troisième région de crues a concerné les rivières descendant de l’est du Massif central entre les Boutières et le Pilat. La Loire en amont du bassin du Puy monte de 2m à Goudet après avoir rempli le barrage de La Palisse ; la Semène, la Dunières, Le Lignon vellave et le Furan montent dans des proportions assez proches. La Loire à partir de la plaine du Forez a peu réagi.
Ces crues n’ont pas attiré les commentaires. Leurs niveaux sont relativement modestes et assez éloignés des grands débordements antérieurs. Les différentes rivières n’ont pas réussi à communiquer leur montée aux grands fleuves. Toutefois une grosse intumescence presque simultanée de l’ensemble des rivières du centre-ouest , d’une partie de celles du bassin de la Seine et enfin des affluents de rive droite du haut bassin de la Loire est une conjonction assez rare pour être signalée. L’association entre des cours d’eaux du domaine océanique et d’autres plus souvent touchés par les pluies cévenoles ou les orages d’été mérite d’être signalée. Elle montre que les pluies d’avril ont largement compensé la faiblesse de la pluviométrie des deux mois précédents et ont suffisamment saturé les sols pour provoquer la réaction des rivières.
Le cumul des précipitations des 3 premiers mois de 2012 se situait parmi les plus faibles connu depuis 1946. Dans une station pourtant parmi les moins arrosées, Andrézieux , l’adjonction d’avril a fait rentrer les précipitations dans la moyenne et depuis 1946, 27 années ont connu un total janvier avril plus faible !
En climatologie il est difficile de satisfaire tout le monde. Avril a apporté des chutes de neige, une tempête et une gelée tardive plus ou moins calamiteuses, mais il a clos au moins provisoirement le chapitre de la sécheresse.
Gérard Staron vous donne rendez-vous samedi prochain sur les ondes de Radio Espérance, bonne semaine.