Chronique n°831
La bouffée chaude éphémère, qui a traversé la France du 25 au 27 juin, mérite attention en fonction de sa rapidité à se mettre en place.
L’analyse des températures maximales permet d’analyser le développement du phénomène.
Le vendredi 24 juin, le thermomètre atteint des niveaux très quelconques pour un début d’été avec une relative uniformité entre 20 et 25°. Se détache au-dessus, une partie du littoral méditerranéen qui flirte avec les 30° dans la région de Toulon. En dessous de 20°, on trouve les côtes océaniques de la Charente au nord du pays avec les régions de montagne. Rien ne laisse penser que 48 heures après on approchera des 40°.
Le samedi, les 30° sont dépassés dans le Bassin aquitain, le Languedoc et la Provence. Montpellier avec 33,8° détient le maximum. Pour trouver 35°, il faut passer en Espagne dans le bassin de l’Ebre ou la Castille. A l’opposé les pays picards et « chtimi » conservent la fraicheur. Tout est encore normal.
Dimanche, la chaleur enfle. La ligne des 30° atteint la région Lyonnaise, la Bourgogne, le plateau de Langres, le sud de la Champagne, La Beauce, La Normandie et l’est de la Bretagne. Une langue se dessine à plus de 35° du Bassin aquitain jusqu’à L’Anjou avec un maximum de 39,2° à Bordeaux, un vrai record pour juin.
Lundi, la bouffée chaude connait son maximum. Seuls échappent aux 30° les côtes d’une partie de la Bretagne et de la Normandie, mais aussi le Languedoc Roussillon ! La langue à plus de 35° s’étire du bassin Aquitain à la Champagne avec deux paroxysmes, une grande région bordelaise où on atteint 39,8° le long du bassin d’Arcachon, et un axe des Limagnes au Nivernais dans le bassin moyenne avec 39,2° à Vichy, promu pays de l’eau chaude.
Mardi, la vague chaude est en net déclin repoussée par l’arrivée de la descente d’air polaire dans l’est du pays avec des températures qui restent proches de 35° dans des bassins ligériens rhodaniens, séquaniens ou rhénans.
Toutes les conditions météorologiques sont remplies pendant ce week-end pour que les températures enflent car il s’ajoute les conditions saisonnières et de la circulation générale de l’atmosphère.
Après le solstice d’été, l’angle d’arrivée des rayons du soleil est maximal, la durée des jours est la plus longue possible. Nous connaissons donc la période de l’année où l’efficacité des rayons du soleil est la plus importante.
L’installation de l’anticyclone des Açores sur la France combine cette efficacité avec une durée très longue de l’ensoleillement du lever au coucher de l’astre. Ces hautes pressions sont en effet bien plus solides en altitude qu’au sol, ce qui empêche la formation de nuages d’instabilité convective pendant l’après-midi, dans une atmosphère très stable qui forme un couvercle au-dessus de notre pays.
Il s’ajoute ensuite à la fin du week-end, un courant de sud, sur le flanc de ces hautes pressions. Il provoque la remontée d’un air en provenance du Sahara jusqu’au Benelux. Ce flux explique que les zones les plus chaudes de lundi se situent dans les zones de la descente de l’air après avoir passé les crêtes des reliefs. Ceci explique les 41° du Pays Basque Espagnol sous le vent des monts Cantabriques, les 39° des Landes derrière les Pyrénées et ceux de Vichy dans les dépressions au nord du Massif central. Ce lundi, il est même amusant de comparer les 25° du Languedoc qui reçoit cet air du sud tempéré par la Méditerranée et les 37 à 39° des Limagnes et plaines de la Loire moyenne, quand le même air descend ensuite des crêtes du Massif central après les avoir franchi. Un air qui monte, se refroidit toujours plus lentement que celui qui descend ensuite, car le premier est plus humide, surtout s’il a traversé une surface marine que le second qui se dessèche.
Enfin le printemps particulièrement chaud et sec que nous avons connu depuis avril a constitué un milieu favorable au retour de la chaleur après les périodes d’arrêt du mois de juin. La plupart des phénomènes climatiques présentent une grande inertie. Il leur est difficile de s’imposer, mais une fois installés, ils résistent. La chaleur n’échappe pas à cette règle et son retour a été d’autant facilité après l’épisode de fraîcheur de la semaine précédente.
En dépit de toutes ces conditions favorables, on peut quand même s’étonner de la rapidité avec laquelle cette vague de chaleur a pu se propager sur la France et de l’ampleur de la hausse des températures maximales en 48 heures.
Cette montée peut interpeler : 20,6° d’écart à Boulogne sur mer entre le 25 et le 27 juin où se déroulait un championnat de France cycliste particulièrement sélectif, on comprend pourquoi dimanche les concurrents sont arrivés épuisés, très dispersés, échaudés. Toute la France est étouffée en 48 heures : 15,5° d’écart à Lille entre le 25 et le 27, 15,6° de différence à Bordeaux entre le 24 et le 26, près de 14° à Deauville entre le 24 et le 26 et plus de 10° partout.
Quand on sait que la hausse des températures minimales a été du même ordre avec parfois plus de 20° au petit matin contre quelques petits degrés au milieu de la semaine précédente, cette variation n’a pas été sans influence sur des organismes qui sont affectés dès que l’on atteint 6° d’écart en 24 heures !
Si cette brutalité d’arrivée peut surprendre, les niveaux maximums de chaleur sont restés limités. Les 40 degrés annoncés sur Bordeaux, lundi, se sont transformés en 38,1° en raison de l’arrivée des premiers nuages orageux et aucune station importante n’a atteint ce seuil. Les 39,2° de Vichy ne constituent pas un record puisque les 40° ont été dépassés en 1952, 1983 et 2003. Le seuil de 40° a été franchi sur de nombreuses régions françaises lors des canicules de juillet 1983, d’aout 2003 et de juillet 2006, et cette fois il n’a pas été atteint. L’arrivée, mardi, des orages en liaison avec une descente perturbée des hautes latitudes, n’a pas permis à l’air chaud de consolider sa position sur une durée plus longue.
La grande surprise de cette vague de chaleur est la suivante. Si l’arrivée de vagues de froid brutales qui font baisser le thermomètre de façon spectaculaire est un phénomène connu, l’arrivée de la chaleur demandait une certaine durée pour atteindre des niveaux élevés comme celui de dimanche et lundi dernier, or ce dernier exemple montre que l’on a eu la même brutalité que lors de l’arrivée des grandes vagues de froid coutumières de ces grands contrastes. La baisse de mercredi et jeudi n’a pas été plus brutale que la montée de samedi à lundi !
Si la hausse du thermomètre de la fin de ce dernier week-end interroge par sa rapidité ? Ce n’est pas la première fois que je constate ces dernières années que la remontée des températures après une période de froid et de fraîcheur est plus rapide qu’autrefois quand s’installe un temps anticyclonique ensoleillé. Au cours de ce dernier printemps chaud, j’ai déjà été surpris à plusieurs reprises de l’extrême rapidité avec laquelle les températures remontaient après une vague de fraicheur, sans atteindre le caractère excessif de ce dernier week-end ! Cette fois, on a atteint un retour de type TGV de la chaleur.
Cette remarque est plus intuitive que fondée sur une étude scientifique précise des durées de remontée de températures lors de l’installation d’un temps anticyclonique ensoleillé, mais nous avons peut être une hypothèse à analyser plus finement en comparant la rapidité de remontée des températures lors de l’arrivée de ces types de temps à diverses périodes : une étude délicate qui risque de prendre du temps !
Et si c’était seulement cela ce que certains nomment le réchauffement de la planète, une facilité de rapidité de hausse des températures ! car, à ma connaissance, personne n’a encore tenté d’établir à quel moment précis ou quel type de temps, l’effet de serre était plus actif !
Gérard Staron vous donne rendez-vous samedi prochain sur les ondes de Radio Espérance, Bonne semaine à Tous.