Une nouvelle année c’est l’occasion d’échanger des vœux, et je vous présente les miens pour 2011, mais aussi d’effectuer le bilan de l’année écoulée. 2010 s’est terminé par un festival climatique final qui a mis en exergue la tendance qui s’était déjà manifestée tout au long des 11 mois précédents, soit la loi implacable du froid.
Des pellicules de neige ont troublé la région parisienne à 3 reprises , lors de la chute de 11 cm du 8 décembre, lors de celle de 15 cm du 19 décembre et enfin à l’occasion de Noël. Il s’agit de petites couches qui ont provoqué plus d’impacts que des plus grosses.
Qui ne se souvient de la paralysie totale des transports sur la route et dans les airs du 8 décembre dans la région parisienne, mais aussi des très grosses difficultés dans les aéroports autant sur la période du 19 et 20 décembre que le jour de Noël. L’affaire est devenue politique comme toujours dans ce cas à Paris !
Il en a été de même à l’aéroport de Londres Heathrow avec des épaisseurs qui n’ont pas dépassé 7 cm selon mes informations !
Ces situations de petite neige m’ont permis de faire une constatation qui peut expliquer beaucoup de désagréments. Ces petites précipitations solides sont très mal détectées par les radars. A plusieurs occasions, ces derniers ne mentionnaient aucune précipitation et pourtant une neige fine de petits flocons à peine perceptibles tombait inexorablement. Par exemple, au début de la veillée de Nôel, devant me rendre en Haute Loire, le radar météorologique n’indiquait aucune précipitations sur les hauteurs de l’est du Massif central entre Mézenc et Pilat et même à plusieurs centaines de kilomètres à la ronde, pourtant l’état des routes n’a jamais été aussi exécrable que ce soir là avec du verglas mélangé à une petite neige qui ne cessait de tomber sur la région stéphanoise : la soirée la plus exécrable sur les routes de la région.
Les épaisseurs de neige de la région parisienne qui ont déchaîné les médias, les politiques, les météorologistes, les transports, surtout les esprits bien pensants, n’ont pourtant rien de comparable avec celles qui ont affecté de nombreux pays. En France, seul le flanc sud de l’Ardennes a atteint des épaisseurs importantes à basse altitude. Comme je l’ai présenté sur le blog, les perturbations neigeuses en provenance du sud-ouest sont venues s’empaler sur ce relief où le froid résistait en profitant du bastion de ce massif montagneux. La couche déposée à Charleville-Mézières atteint de l’ordre de 35 cm , celle de Nouzonville plus de 40 cm et bien plus sur les hauteurs.
L’Allemagne a reçu des hauteurs remarquables en plaine, en particulier dans celle du nord du pays. La région de Berlin a été recouverte de 33 cm, une première fois le 20 décembre et une seconde fois le jour de Noël. La couche a atteint 28 cm à Hanovre, 24 cm à Bonn et Cologne. A la station de référence de Rheinstetten, avec les 24 cm à Noël, une telle couche n’avait pas été atteinte depuis 25 ans et l’hiver actuel est le 5ème sur 65 ans derrière 1982 (31 cm), 1969 (29 cm), 26 cm en 1981 et 1958.
Le Nord-est des Etats-Unis a aussi connu une tempête de neige de grande envergure le lendemain de Noël. Là encore une perturbation remontant le long des cotes de l’Atlantique est venue s’empaler sur l’air froid installé sur le Québec. Dans l’état de New York, l’épaisseur atteint 81 cm à Rahway et 73 cm à Great Kills. Sous un blizzard soufflant à 91 Km/h à l’Aéroport Kennedy, La couche de New York, 50 cm, est la 6ème des 130 dernières années derrière les 68 cm de 2006, les 67 cm de 1926, les 53 cm de 1888, les 52 cm du 25 février 2010, et les 51 cm de1996. Les 46 cm de Boston représentent la 8ème performance nivale de tous les temps dans la ville.
Les exploits de l’air froid n’ont pas été limités à la neige lors des jours du passage de 2010 à 2011.
Les inondations d’Australie ne sont pas dues à un cyclone comme il a été très imprudemment annoncé. Elles sont le résultat, en plein été austral de la pénétration de l’air froid à des latitudes où l’on n’a pas l’habitude de le trouver à cette partie de l’année. Les perturbations des quarantièmes rugissants circulent entre le sud du continent et l’île de Tasmanie au niveau du détroit de Bass. Quand elles sont passées dans la mer de Tasman, leur trajectoire de sud-ouest, soit dans l’hémisphère sud en provenance des régions proches de l’Antarctique, leur a permis de remonter à des latitudes tropicales assez basses et l’air froid qu’elles véhiculent est entré en contact avec le front des Alizés qui les a repris dans un circulation de sud-est. Ceci a rabattu les masses pluvieuses exacerbées par le contraste très fort des températures, contre les côtes du Queensland. Cette situation s’est reproduite 3 fois en décembre : le 11, le 17 et pour Noël. Venant buter contre les reliefs, les totaux pluvieux ont été spectaculaires avec jusqu’à 1200 mm dans certains secteurs côtiers du Queensland. En décembre, Brisbane, pourtant un peu à l’écart du secteur le plus arrosé, a reçu 675 mm. Habituellement le sud de l’Australie entre Melbourne et Sydney constitue la partie la plus arrosée du continent. En cette fin d’année 2010, c’est la moitié nord qui a reçu des totaux exceptionnels. Ces derniers concernent d’abord les côtes de la mer de Corail avec plus de 600 mm, mais ils débordent largement sur le Territoire du Nord et même dans la partie centrale désertique après avoir franchi la Cordillère Australienne.
Le même phénomène météorologique, symétrique dans l’hémisphère nord, est aussi responsable des très grosses pluies de la Guadeloupe du début de cette semaine. Comme l’image de satellite de Claude l’illustre sur le blog, il s’agit d’une descente d’air froid qui vient s’égarer dans les régions tropicales proches du 10 ème parallèle. Une descente froide sur le continent américain, repousse très bas sur l’Atlantique les perturbations tempérées. Sur leur flanc méridional, une partie de leur air froid est repris dans la circulation tropicale des Alizés. Le contact avec l’air chaud des tropiques provoque la réactivation des masses pluvieuses, le développement de phénomènes orageux. L’une de ces lignes de grain particulièrement active est venue buter de plein fouet sur la face orientale de la Guadeloupe.
Ces incursions de l’air froid à des latitudes inhabituelles pour lui sont très rares, même si d’autres auteurs les ont mis en évidence au Cameroun ou aux Philippines. Ceci provoque toujours de très fortes précipitations à proximité de l’équateur.
L’air froid a donc effectué un véritable feu d’artifice terminal en 2010, même si beaucoup de nos collègues humains s’en seraient bien passées. Il a agi aux 4 coins de la planète, l’Europe occidentale, l’Amérique du Nord, l’Australie, les Antilles, mais sa principale performance est quand même le froid.
Dans la région parisienne, on a parlé de mois de décembre le plus froid depuis 1969. Dans la région centre-est, décembre 2005 et 2001 ont parfois eu des températures moyennes plus basses comme à Saint Etienne Bouthéon. Par contre sur l’ensemble de l’année, 2010 est la plus froide depuis très longtemps, depuis 1985 autant au Puy Chadrac qu’à Saint Etienne. La température moyenne glissante sur 12 mois a baissé de l’ordre de 3° sur l’Europe Occidentale de l’Espagne à l’Allemagne depuis mai 2006.
Alors en annonçant que l’année 2010 a eu le premier semestre et même novembre le plus chaud depuis 1880 dans le monde, le réchauffement climatique a un problème avec le thermomètre.
Ces derniers mois, j’ai été surpris des propos excessifs, de scientifiques défenseurs du réchauffement climatique, ceux d’Olivier Godard dans le bulletin de la société météorologique de France, le livre de Stéphane Foucart sur « le populisme climatique » pour associer les climatologues sceptiques à certains partis politiques avec des relans qui n’ont pas lieu d’être. Certains climatologues ont un grave problème avec « le Ciel » dans tous les sens du terme.
Gérard Staron reprend ses rendez vous hebdomadaires du samedi 13h15, avec reprise du texte sur son blog gesta.over-blog. com. Bonne semaine et encore bonne année à Tous.
cariat 13/01/2011 11:55
Gérard Staron 16/02/2011 11:30