L’hiver a encore fait la « Une » de la semaine dans la région Rhône-Alpes ce qui m’oblige à changer le sujet initialement prévu. La Saison ne manque pas de variété cette année et elle nous montre une palette complète de ses "savoir faire" puisque après plusieurs chutes de neige lourde, une vague de froid tenace, voici que la pollution atmosphérique en début de semaine puis le verglas mercredi ont alimenté un tableau déjà très complet. Les habitués de mon blog ont déjà trouvé quelques explications, mais une synthèse s’impose pour les auditeurs de Radio espérance ou les lecteurs de zoom42. ou zoom43.fr à propos de situations météorologiques complexes.
Les régions qui ont connu le problème de verglas de mercredi sont les mêmes qui ont été affectées par des brouillards matinaux tenaces lors des jours précédents, associés à une forte pollution atmosphérique et parfois à des neiges urbaines ou industrielles. Il s’agit des fonds des dépressions du Centre-est de la France, surtout de l’agglomération Lyonnaise avec la vallée du Rhône à partir du défilé de Vienne et du Val de Saône, des plaines les plus basses du département de la Loire, soit la Plaine du Forez et celle de Roanne.
Tous ces phénomènes sont liés car associés à une inversion de température particulièrement tenace qui s’est mise en place dans les hautes pressions qui ont occupé la France les jours précédents.
Dans le calme de l’anticyclone, l’air s’est stratifié pendant la nuit avec le froid plus dense qui s’est tapis dans le fond des dépressions à l’abri des reliefs et celui plus chaud qui est resté au dessus. Le phénomène a touché toutes les basses plaines de l’est de la France, mais aussi de Suisse. C’est ainsi que le radio sondage de Payerne près de Zurich montre qu’il fait une température proche de -10° dans le fond de la plaine centrale helvétique alors que quelques centaines de mètres au dessus, le thermomètre restait à +5°. Chez nous le passage de l’air froid au chaud s’est fait entre 300 et 500 mètres.
Pourquoi ce phénomène associe-t-il en même temps brouillard, pollution atmosphérique et dans certains cas neiges urbaines ou industrielles ?
Le brouillard, l’air en se refroidissant dans les zones basses franchit son point de condensation, puisqu’un air froid peut beaucoup moins contenir d’eau sous forme de vapeur qu’un air plus chaud. Très souvent en dessous de l’inversion, le brouillard apparaît dans la nuit au moment du refroidissement nocturne, il est au maximum de son extension le matin et se dissipe ou non ensuite. Au dessus de l’inversion, le ciel reste clair, le soleil brille dès son lever, par contre il y a souvent des phénomènes de givre, l’humidité de l’air venant s’accumuler au contact du sol gelé ou de la végétation pendant la nuit.
La Pollution atmosphérique dépasse souvent dans ces cas les seuils d’alerte ; 135 mg par litre d’air auraient été dépassés. En cette saison il s’agit surtout de poussières et de dioxyde d’azote émis par les gaz d’échappement automobiles, car en hiver, il ne fait pas assez chaud pour que ce dernier polluant se transforme en ozone. Ces concentrations sont obtenues car le niveau d’inversion de températures tient lieu de couvercle qui retient dans les basses couches les polluants et les empêche de se disperser. Tant que cette situation atmosphérique continue, tous les rejets émis sont emprisonnés et s’accumulent jour après jours et comme la plupart des grandes zones urbaines, fortement émettrices de polluants se situent dans ces zones basses, la situation se dégrade progressivement. Au contraire au dessus du niveau d’inversion, la dispersion des polluants ne pose aucun problème et la qualité de l’air est excellente. L’AMPASEL qui mesure la pollution atmosphérique sur Saint Etienne a eu certainement beaucoup de difficultés pour établir un indice moyen de qualité de l’air avec une moitié de l’agglomération en dessous de l’inversion donc très polluée et une grande partie de la ville au dessus sans aucun problème !
Les chutes de neige dites urbaines ou industrielles sont aussi associées à ce type d’inversion de températures. Les poussières émises dans les zones urbaines les plus polluées viennent inséminer les brouillards situés au dessus. Dans ces zones, les polluants servent de noyaux de congélation autour desquels viennent s’accumuler l’humidité qui forme des flocons dans des températures négatives. Ensuite ces derniers chutent au sol. C’est ainsi que ces zones basses reçoivent de petites chutes de neige qui n’existent pas aux altitudes supérieures. Ce phénomène a été signalé cette semaine par Guy Blanchet sur Villefranche sur Saône, par René Serrières à Pierre Bénite. L’an dernier je l’avais observé dans le bas de Saint Etienne.
Quand mercredi matin arrive la perturbation océanique timorée avec de la pluie et des températures légèrement plus douces, les masses pluvieuses circulent au dessus de cette zone d’inversion où se tapissent les brouillards très froid. La pluie tombe sous forme liquide dans l’air océanique, elle continue en surfusion dans l’air froid situé en dessous, mais elle gèle au contact du sol, qui sert de noyau de congélation en raison des longues journées antérieures de températures très négatives. Elle forme alors une pellicule de glace particulièrement dangereuse sur les surfaces lisses que constituent les chaussées et les trottoirs. Le traitement des voieries agit avec retard, Les carambolages se multiplient d’autant plus que cette surface est peu repérable par sa couleur et que les automobilistes sont trompés par l’altitude, car c’est en descendant qu’ils entrent dans les zones à problèmes
Pour un redoux océanique, avec une perturbation, il est toujours extrêmement difficile de faire disparaître un air très froid solidement implanté depuis de nombreuses journées qui manifeste une grande inertie à ce type d’évolution. Le changement de situation atmosphérique apporte toujours des complications souvent désagréables, le verglas en est une. Ce mercredi, deux phénomènes ont aggravé le problème.
D’abord la faiblesse de la perturbation qui a déposé des totaux pluviométriques dérisoires, 0,2 mm à Saint Etienne. Le verglas atmosphérique correspond à une pellicule fine. Si les précipitations avaient été massives, la pluie et le redoux auraient balayés l’air froid très vite sans geler au sol, ou en cas de températures négatives auraient donnés des chutes de neige.
Dans l’agglomération stéphanoise, la situation a d’ailleurs apporté tous les cas, en bas dans la plaine du Forez, le verglas. Un peu au dessus sur la ville de Saint Etienne, dans l’air océanique qui est passé par-dessus, quelques flocons épars suivis de pluie. Au dessus de la ville, à partir de 650 m sur le Pilat, le refroidissement de l’air au contact de la montagne a permis le dépôt d’une petite couche de neige. C’est ainsi que Saint Etienne s’est trouvé dans la pluie entre le verglas de Lyon ou de la plaine du Forez et la neige du Pilat.
L’arrivée de la perturbation en fin de nuit est aussi le facteur aggravant. Elle arrive sur la zone d’inversion de température et ses brouillards à l’heure où cette dernière est toujours la plus solide et la plus difficile à balayer. Ensuite l’air océanique de la perturbation s’est refroidi pendant la nuit en arrivant sur des zones plus élevées. Les températures sont proches de zéro comme le montre le passage à la neige à partir de 650 mètres.
Dans mes prévisions météorologiques sur zoom42.fr et mon blog, j’avais annoncé dès la veille le risque de neige ou de verglas. Le matin, en constatant seulement un peu de pluie à Saint Etienne, j’ai cru avoir alarmé inutilement mes lecteurs, pourtant j’ai vite appris le verglas qui était en dessous et quand les nuages se sont dispersés après 11h j’ai pu voir la nouvelle couche de neige au dessus de la ville !
Décidément, cet hiver 2008-2009 ne manque pas de facettes complexes pour se rappeler à notre mauvais souvenir.
Gérard Staron vous donne rendez-vous samedi prochain sur les ondes ou le site 13 h 15 de Radio Espérance, le texte étant repris sur les portails Internet zoom42 et zoom43.fr et ce blog .