La capitale de l’Auvergne et celle des villes d’eaux dans la dépression des Limagnes ont battu des records d’air chaud et froid cette semaine.
Dans ma précédente chronique, je vous signalais qu’après une gelée (-0,2° le 4 octobre), les deux villes étaient les plus chaudes de France le 7 octobre, avec 26,2° et 26,3°. Ces contrastes ont continué au niveau des températures maximales.
Le 8 puis le 9 octobre, Clermont et Vichy, sont parmi les villes les plus froides de France puisque les maximums se situent respectivement à 12,8 et 13,8° pour le première et 13,7 et 13,8° pour la seconde. Ces deux jours, seuls Le Puy, Guéret et Mende à des altitudes plus élevées, présentent un thermomètre plus bas.
Depuis le 11 octobre, une nouvelle situation inverse place les deux cités auvergnates dans les plus chaudes de France.
Le 11 octobre, seul Brive et Bergerac ont la gaillardise ou le nez de dépasser les 25,8° de Vichy .
Le 12 octobre, la cité thermale est la ville la plus chaude de France métropolitaine avec à nouveau un maximum de 26,3°. Clermont avec 24,9° n’est devancé que par Biarritz, La Rochelle et Brive encore Gaillarde.
Le 13 et le 14 octobre, les deux villes auvergnates apparaissent encore au palmarès de la chaleur. Elles ne sont devancées que par quelques cités du Bassin aquitain et du Piémont pyrénéen le 13, ou languedociennes le 14.
Le 15, la situation évolue. Si Vichy décroche, Clermont Ferrand résiste avec 22,5° devancé par Saint Etienne avec 22,9° et Perpignan en Roussillon. Signaler le surprenant 20,9° du Puy Loudes.
L’explication de ces particularités, déjà signalées sur cette antenne, est liée à la situation géographique des Limagnes dans lesquelles sont incluses les deux stations. Il s’agit d’une vaste dépression méridienne allongée, ouverte vers le nord. C’est aussi un cul de sac ceinturé sur les autres côtés par les hauteurs du Massif central : celles des reliefs volcaniques à l’ouest, les monts de la Margeride et du Velay vers le sud et enfin l’axe du Forez aux monts de la Madeleine à l’est.
Quand arrive une descente polaire, arctique ou sibérienne, l’air froid vient se piéger à l’intérieur du cul de sac ouvert en direction du septentrion. Il stagne dans les bas fonds. Les Limagnes sont parmi les régions les plus froides de France. Près de l’Allier le nombre de jours de gel moyen par an approche 100. Le 4 et le 5 octobre, puis le 8 et le 9, l’air froid de nord est bien arrivé en arrière de la perturbation de nord-ouest avec les conséquences annoncées sur les Limagnes. Cette arrivée a connu le 8 une particularité rare, la température la plus chaude de la journée s’est produite à 1h du matin, et le thermomètre a ensuite baissé toute la journée.
Quand arrive un flux de sud en bordure d’une perturbation qui avance lentement de l’ouest et d’un anticyclone centré à l’est, l’air franchit les hauteurs du Massif central, puis redescend en direction des Limagnes, il prend en enfilade l’ensemble de la dépression qui le canalise. Alors, selon les lois de la physique, il s’assèche, il se libère de ses nuages pour donner un ciel clair qui permet la pleine action du soleil et surtout il se réchauffe au rythme de 1° par 100 mètres, de façon plus rapide que l’air chargé d’humidité qui évolue au rythme de 0,6° par 100 mètres. Sur 1000 mètres de dénivelé, l’écart atteint 4°. Dans ces conditions, ces dépressions disposent de températures nettement supérieures aux autres régions françaises.
Le 7, puis le 12, les flux de sud ont été au maximum de leur puissance lors du retrait de l’anticyclone vers l’est et Vichy a été la cité la plus chaude de France.
La situation de ce mois d’octobre n’est pas sans poser quelques questions subsidiaires.
D’abord pourquoi Vichy s’est plus soigné à l’air chaud que Clermont Ferrand plus habitué du phénomène ?
La topographie des deux villes est différente. La cité thermale est dans le fond de vallée de l’Allier à l’aval de la plaine des Limagnes, alors que la station de la capitale auvergnate correspond à un cul de sac face au nord entre la plaine proprement dite et le pays coupé de buttes volcaniques situé un peu au dessus. Clermont a bien justifié sa réputation pour la froidure en recevant de face le maximum d’air froid. Par contre l’air chaud qui descend des reliefs a continué son avancée vers l’aval pour se débarrasser de ses derniers nuages, pour compléter son réchauffement jusqu’à la cité thermale.
Lors de ces coups de froid ou de chaleur, les plaines qui longent la Loire présentent la même situation topographique et orientation géographique que les Limagnes. Très souvent la plaine du Forez partage les mêmes caractéristiques thermiques. Cette fois, la station de Bouthéon a été beaucoup plus discrète que d’habitude à l’exception du 15 octobre où elle dépasse Clermont. Le 4 la gelée clermontoise n’a pas d’équivalent en Forez avec un minimum de 2,8°. Lors des bouffées de chaleur, les performances de Bouthéon sont inférieures de plusieurs degrés à celles de leurs voisines auvergnates, sauf le 15 octobre. Le maximum enregistré atteint 24,3° le 12 octobre, soit près de 2° de moins que Vichy. On constate un écart de 2 à 4° nettement supérieur à ce que l’on observe habituellement lors de ce type de situation où les deux ensembles déprimés parallèles réagissent de façon semblable.
L’analyse des cartes météorologiques montre que le décalage de 150 Km entre les deux sillons méridiens de la Loire et de l’Allier est suffisant pour modifier un peu la situation atmosphérique. Les Limagnes sont un peu plus en bordure de l’anticyclone. Dans ces conditions le flux de sud est plus actif pour dégager le ciel et favoriser l’ensoleillement et le réchauffement. Au contraire, l’air est plus stagnant du côté forézien ce qui permet le maintien de nébulosités et limite la hausse du thermomètre. Seul le 15, un léger décalage vers l’est des centres d’action, déplace le coup de chaleur sur Saint-Etienne !
Le cas de cette semaine est d’ailleurs paradoxal. Le plus souvent l’air stagne beaucoup moins côté forézien que côté auvergnat. La proximité entre les couloirs de la Loire et du Rhône, la faible hauteur des reliefs qui les sépare, permet souvent un léger courant d’air entre les deux axes même par flux atmosphérique nul. Ceci ne se produit pas dans les Limagnes en raison de l’encadrement montagneux épais qui les borde vers le sud et qui accentue l’effet de cul de sac ! A ce titre la situation du 15 octobre où le coup de chaleur de Saint Etienne dépasse un peu celui de Clermont est la situation normale.
Cette particularité rend la situation de cette semaine originale car en temps ordinaire les deux ensembles déprimés du nord du Massif central réagissent de concert.
Que les Limagnes aient été la région la plus chaude ou la plus froide de France est un phénomène rare certes, mais souvent décrit dans cette chronique. La répétition deux fois dans chaque sens à quelques jours d’intervalle accentue l’aspect surprenant ! Le fait doit être relié aux inversions multiples des flux atmosphériques de ce début de mois d’octobre avec l’alternance d’anticyclones peu stables qui arrivent par l’ouest avec flux de nord et repartent par l’est avec vent de sud et de perturbations. La douche auvergnate devrait être au moins aussi célèbre que son homologue écossaise ! Ce n’est peut-être pas fini
C’est l’occasion d’annoncer aux auditeurs de Clermont Ferrand que depuis cette semaine j’ai introduit dans mes prévisions météorologiques sur ce blog, le département du Puy de Dôme à côté de ceux de la Loire et de la Haute Loire qu’elles couvrent déjà.
Gérard Staron vous donne rendez vous samedi prochain pour la 700ème chronique, 100 fois le chiffre de la sagesse, le texte étant repris sur zoom42 et zoom43.fr et ce blog.
http://pagesperso-orange.fr/climatologie.staron